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Quatre attitudes vis-à-vis de l’argent

Nos attitudes vis-à-vis de l’argent influencent grandement la façon dont celui-ci circule dans notre vie. 

Dans beaucoup de familles, on ne parle pas d’argent; si oui pour décrier son absence ou alors pour l’accuser de tous les maux de la Terre. Chez nous, les fois où mon père nous réunissait pour parler d’argent et sortait tous ses bulletins de paie, c’était pour nous expliquer que son salaire de fonctionnaire n’était pas assez pour nous donner le cadre de vie que nous avions et que c’est grâce à ses plantations qu’il pouvait se permettre de nous envoyer dans des écoles privées et nous acheter toutes nos fournitures scolaires. Le message sous-jacent ici était qu’une fois que tu es scolarisé avec tous tes manuels scolaires, que tu manges tous les jours à ta faim, il ne faut plus demander quoi que ce soit de superflu parce que tu es déjà privilégié d’avoir cela. 

On taquinait souvent mon père parce qu’il avait la même réponse à toutes nos demandes : « je n’ai pas d’argent ». Cette réponse était valable du 1er janvier au 31 décembre et on se demandait souvent à quel moment il touchait son salaire. Lorsqu’il s’agissait d’une demande concernant l’école, il y avait une petite nuance: « on verra ça quand j’aurai l’argent ». Je tiens à clarifier ici que ne pas avoir d’argent dans le langage parlé de chez nous, ne signifie pas être littéralement sans argent. Ça signifie qu’on n’a pas d’argent à consacrer à la requête qui nous est soumise.

Au-delà de ce discours focalisé sur le manque, on entend très souvent aussi « l’argent ne pousse pas sur les arbres, tu crois que je suis (insère le nom d’une personne reconnue très très riche) », ou encore toutes sortes d’expressions sur la dureté de gagner de l’argent.

Ces discours façonnent grandement notre rapport à l’argent et la façon dont ce dernier circule dans notre vie. Quand on a été biberonné au discours sur le manque d’argent, comment l’argent est difficile à gagner, comment les personnes qui ont de l’argent pactisent nécessairement avec le diable, on finit par développer 4 attitudes vis-à-vis de l’argent: l’évitement, le culte, le symbole de statut social et la vigilance. Voyons dans le détail ces différentes attitudes.

L’évitement

Cette attitude provient de la croyance que l’argent est mauvais. Chez nous on dit « l’argent c’est l’herbe du diable » et le diable se servirait de cette « herbe » pour amener les gens à se soumettre à lui et à le servir. On s’entend que quand quelqu’un croit que quelque chose est susceptible de l’éloigner de ses valeurs, il aura tendance à l’éviter, consciemment ou pas.

Combien de fois entends-tu des gens dire « je ne suis pas à l’argent »? Tu fais un travail et tu te fais payer des pinottes parce que « tu aimes ton travail et tu ne le fais pas tant pour l’argent ». Est-ce que ça te semble familier?

Les personnes qui évitent l’argent éprouvent de l’anxiété ou du dégout pour l’argent. Elles pensent aussi souvent qu’elles ne méritent pas de gagner de l’argent. Elles peuvent donc autosaboter leur réussite financière, éviter de dépenser de l’argent, même pour des achats raisonnables ou nécessaires, ou encore dilapider inconsciemment de l’argent dans le but d’en avoir le moins possible à leur disposition. 

D’après les recherches, les jeunes entre 18 et 30 ans sont ceux qu’ont retrouvent le plus avec ces scripts financiers. On suppose ici que l’absence de charge financière autre que soi-même justifie cette croyance que l’argent n’est pas nécessaire.

Le culte

Cette attitude provient elle aussi d’un esprit de manque. La personne qui a longtemps entendu le discours de l’absence d’argent développe l’idée qu’avec un peu plus d’argent, elle pourra réaliser des projets et être heureuse. Les personnes qui vouent un culte à l’argent sont souvent des accumulatrices sans réels objectifs. Elles veulent avoir le plus d’argent possible en pensant que c’est le prochain dollar accumulé qui résoudra tous leurs problèmes. 

Ces personnes ont tendance à jouer à la loterie en espérant que si elles gagnent le gros lot alors elles seront plus heureuses. Mais une fois de plus, les recherches ont démontré que même en gagnant à la loterie, le bonheur de ces personnes n’est pas de longue durée. Elles se retrouvent très souvent déprimées ou aussi pauvres qu’avant d’avoir gagné à la loterie. Elles démontrent aussi d’autres attitudes telles qu’une prise de risque excessive (les gens qui retirent l’argent des REER pour investir dans la crypto), les jeux d’argent, l’excès de travail, les dépenses excessives et les troubles d’achats compulsifs.

Ces personnes sont généralement, sans surprise, surendettées. Elles comptent sur le crédit pour vivre une vie qu’elles espèrent meilleure en s’achetant beaucoup de choses matérielles ou même des expériences. 

Le symbole de statut social 

Ici l’estime de soi est rattachée à ses avoirs nets. Plus on aura de l’argent plus on aura une haute estime de soi. Les personnes qui ont cette attitude vis-à-vis de l’argent vont chercher à accumuler le plus de biens matériels possible que leur entourage. Pour elles, le concept de classe sociale est très important, car il permet de se distinguer des autres. 

As-tu jamais entendu l’expression « keep up with the Jones »? Ces personnes sont les voisins directs des Jones. Dès que le voisin s’achète une nouvelle voiture, on s’achète aussi une nouvelle voiture de même standing voir supérieur. Le collègue va en vacances 3 fois par an? Nous aussi! Et ainsi de suite. 

Sans surprise, les personnes qui considèrent l’argent comme un symbole de statut social dépensent trop puisque c’est par leurs dépenses qu’elles s’affirment au monde. Elles prennent aussi des risques inconsidérés, car elles veulent gagner le plus d’argent possible le plus rapidement possible pour maintenir leur rythme de vie extravagant. 

La vigilance 

On a honte de l’argent et on n’en parle pas, on ne dit ou ne montre pas qu’on en a ou qu’on en a pas. L’argent est un sujet tabou dont on ne parle pas même avec son/sa partenaire. 

La vigilance monétaire vient de la crainte de ne pas en avoir assez à un moment donné pour faire face aux situations normales de la vie courante. Les personnes vigilantes vis-à-vis de l’argent vont préférer garder leur argent dans un compte d’épargne qui rapporte 0,05% plutôt que de l’investir parce qu’elles ont peur de perdre leur argent et de ne plus en avoir assez dans le futur (pourtant c’est une telle attitude qui met en danger leur argent).

Bien que la vigilance monétaire puisse être utile pour épargner et vivre en dessous de ses moyens, poussée à l’extrême, elle empêche de profiter de la vie parce qu’on pense toujours à un potentiel danger qui pourrait survenir et pour lequel on n’aurait pas assez d’argent pour faire face. 

Où est-ce que je me situe?

Je pense que je me situe à mi-chemin entre l’évitement et la vigilance. Comme j’ai mentionné au début, on ne parlait d’argent chez nous que pour dire qu’il n’y en a pas. Donc, j’ai développé une certaine vigilance à dépenser mon argent. Avant de dépenser, je me demande toujours si je n’aurais pas besoin de cet argent dans quelques jours pour quelque chose de plus important et je me rends compte maintenant que c’est une attitude de vigilance. 

Les attitudes de vigilances dans lesquelles je ne me retrouve pas sont celles de l’aversion au risque. De nature, je suis plutôt peureuse, mais je n’ai pas peur d’investir mon argent parce que je sais que c’est la meilleure chose à faire.

Pour ce qui est de l’évitement, j’ai tendance à ne pas vouloir dépenser même pour les dépenses essentielles. C’est une caractéristique qui se croise à mon avis avec la vigilance où on est anxieux quant au futur et qu’on veut être sûr qu’on en aura assez.

Il est important à mon avis de connaitre son attitude vis-à-vis de l’argent parce que souvent on se bat avec des difficultés financières et on pense que ces difficultés sont liées à nos revenus ou à la façon dont nous dépensons alors que souvent cela vient des schémas mentaux que nous avons envers l’argent.

Note: Les attitudes mentionnées dans cet article viennent de l’étude menée par  Klontz, B., Britt, S. L., & Mentzer, J. (2011). Money beliefs and financial behaviors: Development of the Klontz Money Script Inventory. Journal of Financial Therapy, 2(1), 1-22. 

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