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Investir. Spéculer. Jouer au hasard

Il est important de distinguer les opportunités financières selon leur probabilité d’être profitable, d’être non profitable ou d’avoir une issue complètement incertaine. Cette distinction permet de simplifier l’univers de l’investissement. 

Le risque de perdre de l’argent est la principale raison que les gens évoquent très souvent pour justifier leur décision de ne pas investir. Au-delà du fait qu’il existe beaucoup d’autres risques financiers comme on en avait parlé ici, il faut savoir que ce qu’on fait à la bourse détermine aussi le type de résultats que l’on peut obtenir. Certains pensent que le simple fait d’acheter l’action d’une compagnie lambda constitue un investissement. Mais ce n’est pas aussi simple que cela. Dans son livre Money for the rest of us (L’argent pour le reste d’entre nous), J. David Stein fait une distinction fondamentale entre l’investissement, la spéculation et les jeux de hasard.

Investir 

Investir c’est miser sur une opportunité dont la probabilité d’être profitable est élevée. Les actions, les obligations et l’immobilier peuvent rentrer dans cette catégorie. On les considère comme des investissements parce qu’ils ont une probabilité élevée et fiable de générer des revenus sous forme de dividendes, d’intérêts et de loyers. Ceci ne signifie pas qu’un investissement a toujours un rendement positif, mais à long terme, il est raisonnable d’espérer un rendement positif. 

Une idée bien répandue sur l’investissement est qu’investir c’est choisir des actions. Si des investisseurs célèbres comme Warren Buffet et Peter Lynch notamment ont fait fortune en choisissant des actions individuelles, pour des personnes lambda comme toi et moi, il est plus prudent (mais pas pour autant moins rentable) d’investir dans des fonds négociés en bourse ou fonds indiciels qui, non seulement, nous permettent de détenir des stocks de plusieurs compagnies en un seul achat, mais en plus nous offrent la diversification nécessaire pour mitiger les risques liés aux actions individuelles.

Spéculer

Spéculer c’est miser sur une opportunité dont l’issue est incertaine. On n’est pas sûr qu’on aura un résultat positif ou négatif. L’incertitude ici vient du fait que l’actif dans lequel on a investi ne génère aucun revenu comme les dividendes, les intérêts ou les loyers. La seule façon de faire de l’argent lorsqu’on spécule, c’est de trouver une personne disposée à payer l’actif à un prix plus élevé que celui auquel on l’a acheté. La grosse inconnue de l’équation étant de savoir si on va trouver des personnes dans le futur voulant payer cet actif à un prix plus élevé. Un exemple de spéculation à laquelle on se livre tous dernièrement est l’achat de cryptomonnaies. 

Cela fait quelques années déjà que la cryptomonnaie est dans le paysage financier. J’ai un vague souvenir du moment où ça a été créé et que la plupart des gens pensaient que ce n’est qu’une lubie qui disparaitrait dans quelques années. Sauf que ça fait une bonne dizaine d’années que les cryptomonnaies sont là, et il s’en crée des nouvelles chaque jour. 

Beaucoup de personnes sont persuadées que la crypto est là pour durer. D’autres pensent que non. Mais comme personne ne détient la vérité, et que nous avons pour la plupart peur de manquer ce qui pourrait être le plus gros actif du siècle ou même du millénaire, beaucoup d’entre nous investissent dans la crypto. Mais il n’en demeure pas moins que ça reste un actif spéculatif.

Dans son livre, J. David Stein compare la crypto à la tulipomanie qui eut lieu au milieu du XVIIe siècle en Hollande. Dans cette crise que certains considèrent comme le premier krach financier de l’histoire, l’Europe a démontré un grand engouement pour le jardinage et l’horticulture. C’est ainsi que la tulipe, alors peu connue du public, est devenue un symbole de luxe et de bourgeoisie. Elle commence à se négocier comme des biens durables et tout le monde veut en posséder. Au plus fort de la bulle, un bulbe de tulipe se négocie à 6700 florins soit la valeur de deux maisons.

En lisant cette histoire aujourd’hui, on est tenté de secouer la tête en disant « mais quelle bêtise! Faut pas être une flèche pour savoir que c’était une bulle spéculative ». Mais nul ne sait si c’est ce que nous sommes également en train de faire avec les cryptomonnaies. Tout le monde connait (en principe) la blockchain qui est la technologie qui sous-tend les crypto, mais personne ne sait si dans 10, 15 20 ans les cryptos feront encore partie du paysage. C’est vrai que ça fait plus de 10 ans qu’elles sont là et pour les enthousiastes, c’est un signe que c’est un actif qui est parti pour durer longtemps surtout depuis que certains pays l’adoptent comme monnaie légale. Mais on n’en a aucune certitude. 

Jouer à la loterie

Jouer aux jeux de hasard c’est miser sur une opportunité dont la probabilité d’un rendement négatif est statistiquement élevée. Ici on l’aura compris, l’actif sur lequel on mise a de très faibles probabilités d’avoir un rendement positif. On compte sur la chance pour faire de l’argent. Il faut savoir aussi que les jeux de hasard, sur le long terme, ont toujours un rendement négatif.

Si tu as suivi l’actualité des marchés financiers en début 2021, tu as sans aucun doute entendu parler de GME, AMC et autres actions dont le cours a dramatiquement augmenté sans raison autre que celle de personnes qui en ont décidé ainsi. De nombreuses personnes ont réalisé de gros profits grâce à ces actions. Certains ont revendu et empoché les bénéfices tandis que d’autres sont persuadés que la valeur de l’action va atteindre un million de dollars et continuent de s’y accrocher en attendant le décollage pour la lune

Ça, c’est jouer à la loterie. Quand on regarde de près les entreprises faisant l’objet de cette frénésie, ce sont des entreprises qui, depuis des années, sont à l’agonie et enregistrent des mauvais résultats financiers qui font dire aux experts qu’elles ne seront pas rentables à long terme. Mais des gens pensent qu’en achetant en masse une action, ils pourront renverser les mauvais résultats de l’entreprise. Nul ne connait l’avenir, mais quelqu’un qui cherche à bâtir un patrimoine durable est certainement mieux de se tenir loin de ces jeux de hasard.

Ces trois types d’opportunités sont présentes sur les marchés boursiers. Avant donc d’affirmer qu’on ne veut pas investir à la bourse parce qu’on a peur de perdre son argent, il faut s’assurer qu’on investit effectivement. Je parlais à quelqu’un il y a quelques jours qui m’a dit « j’ai perdu un peu d’argent en investissant à la bourse dernièrement ». Je lui ai dit qu’il a perdu de l’argent en spéculant et en jouant à la loterie à la bourse et non en investissant. L’investissement a un horizon de temps généralement de moyen et long terme et les retours espérés ont une forte probabilité d’être positifs.

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